J'ai choisi de vous présenter ici Hervé Claireaux, un chef d'entreprise, artisan créateur d'espaces extérieurs en bois. Situé dans le sud des Landes, je l'ai accompagné dans la création et la conduite d'entretiens annuels.
Outre l'incroyable qualité du travail de son équipe, ce qui m'a marqué, c'est que moi aussi, en l'accompagnant, j'ai eu envie de devenir artisan et d'être managé par Hervé. Une de mes profondes convictions est que l'expertise en management ne dépend pas du nombre d'années d'expériences à manager, ni du statut dans l'entreprise.
J'ai eu alors envie de partager, ici, la vision d'Hervé sur son management. Ces choses simples que nous devrions nous efforcer de faire loi dans le monde du travail. Puis parce que cette histoire entrepreneuriale d'Hervé est aussi une leçon de vie.
NR. Pourquoi et comment être devenu entrepreneur?
HC. Tout d'abord pour la liberté et l'indépendance que m'offre le statut. Aussi évidemment par goût pour la création puisque très tôt, j'ai imaginé puis conçu des objets que je tentais de commercialiser sur les marchés.
Je me suis lancé après dans l'entreprenariat car j'ai dû quitter une société dans laquelle je ne me sentais pas bien et il n'y avait pas beaucoup de postes à pourvoir dans mon secteur . Donc je me le suis crée. C'est vite dit! Mais ce fut une épreuve très lourde puisque c'est aussi ma vie toute entière que je devais réinventer à ce moment.
NR. Avec quoi as-tu commencé?
HC. Je suis parti de rien. Ou presque. Des aides du Pôle Emploi ont bien sûr facilité mon lancement même si ce n’était pas le Pérou. Une voiture, qui était aussi ma voiture personnelle, une remorque, une perceuse-viseuse de base, une scie circulaire achetée chez LIDL. D'ailleurs pour l’anecdote, cette voiture, c'est ma mère qui me l'a acheté. C'était une ancienne Kangoo d'occasion de La Poste. Donc couleur jaune La Poste!
Mes premières intentions commerciales ont été de me tourner vers mes anciens patrons chez qui j'avais été stagiaire en étant jeune en leur permettant d'externaliser certains de leurs travaux de menuiserie.
NR. A quoi ressemblaient tes débuts?
HC. Je me devais de réussir car je n'avais pas de droits au chômage. J'ai passé un an et demi très dur avec un carnet de commandes qui ne dépassait pas 2 semaines. Je faisais en sorte de diminuer drastiquement mes charges fixes, je n'avais pas d'atelier, je faisais tout le travail directement chez les clients.
NR. Et aujourd'hui?
HC. Et bien cela fait 10 ans. Un demi-millions de chiffre d'affaires réalisé en 2020 et un carnet de commandes sur 3 mois, un téléphone qui sonne une cinquantaine de fois par jour. Et une équipe de cinq excellents jeunes.
NR. Manager pour toi, c'est...?
HC. Manager, c'est leur apprendre. Leur transmettre ce que je sais, mettre en œuvre les moyens nécessaires pour leur permettre de progresser. De l'écoute, de la pédagogie, j'aime vraiment leur transmettre mon savoir. Je m'applique à regarder ce qu'ils font pour relever un maximum de points positifs de leur travail et les points à travailler, nous les travaillons ensemble puis je le leur laisse rapidement leur autonomie. Mon crédo est "c'est en forgeant qu'on devient forgeron". Leur permettre de faire un maximum de tâches en autonomie, c'est leur permettre de gagner en expérience.
Les faire progresser, c'est les motiver à rester et à devenir meilleur, ce qui permet de développer l'activité, la rentabiliser et donc de pérenniser l'entreprise. Je veux créer une forte adhésion à l'entreprise.
NR. Que fais-tu d'autre pour rendre tes collaborateurs performants?
HC. Comme je leur fais faire un maximum de mise en œuvre, le droit à l'erreur est important. On ne peut pas ne pas en faire. Ce qui est important pour moi, c'est leur engagement. Tant qu'ils veulent bien faire, bien sûr qu'ils ont droit à l'erreur. On est plus à l'aise dans notre travail si l'on sait qu'on a droit à l'erreur.
Je les fais travailler en binômes complémentaires. Sur un chantier, ils passent des journées entières à être à deux donc la complémentarité est importante. Il faut qu'elle soit technique et de caractère. Cela leur permet d'être plus efficaces et de prendre du plaisir. Ils travaillent en extérieur toute l'année donc une atmosphère de travail agréable est essentielle. De mon poste de patron, j'en suis un garant important.
J'ai aussi souhaité mettre en place des entretiens annuels avec deux objectifs:
- avoir un moment avec chacun, ce que je n'avais pas encore fait car dans l'artisanat, ce n'est pas monnaie courante,
- continuer à les connaître mieux, savoir ce qu'ils aiment vraiment faire et je voulais savoir si certains d'entre eux étaient motivés et techniquement prêts dans les choses que je souhaitais mettre en place en dés 2022. Par exemple, je souhaite développer la pose de parquet mais pour ça il faut que l'équipe sache le faire et surtout qu'ils aient envie de le faire.
NR. Quels en sont les résultats et quels sont les résultats de ton management?
HC. Pour les entretiens annuels, c'était génial car c'était la première fois pour eux et pour moi dans notre vie que nous faisions ça et avoir un échange particulier avec chacun a été plutôt fort. En plus, nous sommes dans l'artisanat, un milieu assez viril, besogneux et cela leur a permis de s'essayer à l'exercice de l'entretien. Ils se sont sentis concernés, ils ont beaucoup apprécié ce moment.
Sur le plan plus managérial, l'équation est simple. Cela fait plus de 5 ans que j'ai la même équipe et aucun turnover. Ils sont dévoués et personne ne veut partir à aujourd'hui encore.
NR. Et sur le service client?
HC. Là j'en reviens pas moi-même! Les clients n'ont pas le réflexe de nous laisser leurs avis sur Google mais ceux qui y sont, sont excellents. L'équipe est constamment félicitée. Des fois c'en est même incroyable.
C'est ce qui nous a permis en 2021 d'acquérir notre plus gros chantier pour "70 Hectares & L'Océan", un domaine prestigieux au cœur du Golf de Seignosse. Nous avons réalisés pour 620m carré de terrasses en bois. Un chantier colossal.
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